Penser le chez-soi

Se loger aujourd'hui

Penser le chez-soi

La définition du logement est en constante réinvention : elle doit s’adapter aux nouveaux usages, aux nouvelles manières de communiquer, de se déplacer, d’occuper l’espace, de travailler, d’étudier... Mais elle se fait aussi en lien avec les réglementations, contraintes d’optimisation de l’espace et de rendement, hausse des prix, etc., qui mettent en difficulté l’accès au logement et aboutissent une diminution croissante des surfaces habitables.



Bouleversement des modes d’habiter


Au long de ces deux dernières années, la crise sanitaire a également agi comme révélateur de nouvelles attentes. Considérant la question de l’habitation, c’est une volonté de se regrouper et de rechercher un vivre-ensemble. En effet, à l’annonce des confinements, de nombreuses personnes ont choisi de quitter leur logement pour rejoindre un groupe d’amis, des parents ou un partenaire. Les étudiants, dont l’observatoire de la vie étudiante estime à 66% les changements de logement pour cause de solitude lors de la pandémie de Covid-19, ont particulièrement été touchés par cette situation. Le logement du « jeune travailleur » ou du « jeune chercheur » représente ainsi une typologie historique de l’habitation en quête d’évolutions.

Prendre soin de l’espace individuel


Depuis sa forme ancienne romaine “cubiculum domus” - une chambre dotée d’un lit et d’une table, l’espace privé individuel revêt un caractère social particulier : il offre la possibilité de s’isoler des autres pour prendre soin de soi. La notion d’“idiorythmie”, mot formé à partir du grec “idios” et “rhuthmos”, est emprunté au vocabulaire religieux des monastères par Roland Barthes en 1977, au cours d’un séminaire intitulé “comment mieux vivre ensemble”, pour illustrer ce compromis entre le besoin de retrait et la nécessité d’un engagement vers le commun.


Aujourd’hui, les chambres en résidence sont encore la représentation de cette dualité : une intériorité isolée contre une majorité de temps dédié à des activités extérieures. L’espace habité est asymétrique : la petite surface où les fonctions sont réduites et compactées forme un bref lieu de repli alors que son espace partagé est celui de la ville. 

Accompagner les temporalités


La temporalité de ces typologies de résidences est également singulière du point de vue du parcours des résidents. Il s’agit pour des jeunes de « quitter le nid » et d’être guidé vers une progressive autonomie. Ce logement pionner du parcours domestique se place donc à la frontière entre un cadrage des fonctions et une ouverture à l’appropriation.


Aujourd’hui, s’intéresser aux petits espaces nécessite de porter une attention particulière à leur contenu, d’en prendre soin jusque dans le mobilier. Car l’aspect provisoire de ces logements ne doit pas être vu comme une justification pour la dégradation des conditions d’habiter. Au contraire, ceux-ci doivent permette de cultiver l’intériorité et d’accompagner leurs jeunes habitants, qui n’ont pas forcément la possibilité de bien se meubler ou s’équiper. 

Lumière et espace


La cellule individuelle temporaire pose ainsi une double question : comment penser un « espace minimum » et comment permettre un « chez-soi » ? Le positionnement de Camille Salomon prend deux directions principales : d’une part l’importance accordée à l’ambiance lumineuse du logement, d’autre part une attention portée sur l’ameublement.


Avec l’idée que la lumière naturelle est un facteur déterminant de la qualité de vie dans les petits espaces, les ouvertures sont généreuses et laissent entrer la lumière, en permettant une mise en vibration de l’espace et de la plasticité des matériaux. L’ensemble menuisier est aussi une composition étudiée pour décliner les usages, varier les possibilités d’aération ou moduler l’intimité par les profils et l’ombrage. 

 

L’optimisation des espaces, la recherche d’une dimension appropriée liée au corps et à l’usage sont aussi au centre de la conception. S’inspirant de l’expérience immersive de l’artiste Absalon, décidant d’habiter, en 1993, six cabines d’habitation de 9m², Camille Salomon propose des solutions de cabines préfabriquées dessinées selon les besoins précis de l’habitant. Elles concentrent les usages essentiels du logement et permettent en retour d’ouvrir un espace plus libre d’appropriation. 

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